Vie du lycée
Pas de liberté de la presse sous les bombes

Pas de liberté de la presse sous les bombes

À l’occasion de la semaine de la Presse, la situation des journalistes otages en Syrie a été évoquée jeudi 27 mars après-midi lors d’une conférence donnée au CDI. 

M. Eyraud, journaliste et représentant à Marseille du comité de soutien et M. Hénin, économiste et père d’un otage, sont intervenus et ont débattu avec des élèves de seconde et des rédacteurs du journal.

Pierre-Yves Hénin et Jean-François Eyraud devant les élèves
Pierre-Yves Hénin et Jean-François Eyraud devant les élèves

Au début de Mars 2011, des manifestations stimulées par le “printemps arabe” ont eu lieu en Syrie. Laïcs et islamistes plus ou moins extrémistes se sont rassemblés dans le seul but de faire tomber le gouvernement de Bachar el-Assad. Poussés par un élan de liberté, ce qui est aujourd’hui une guerre en Syrie, a vu le jour avec les « enfants de la liberté ». Sur le mur de leur école, à Deraa, on pouvait lire : « Liberté, démocratie, ton tour viendra, Bachar ! ». Ces enfants, exprimant simplement leur soif de liberté, ont été torturés par le gouvernement syrien. La cruauté du régime est à l’origine d’un grand soulèvement populaire, qui s’ est peu à peu embrasé.

 Les manifestations pacifiques ont laissé la place aux bombes et aux armes chimiques.

Cela fait maintenant 3 ans, que le peuple syrien, est décimé. « Au total, 107 net-citoyens tués ; 140 000 morts dont 7 262 enfants ; 2,5 millions de réfugiés syriens ainsi que 6,5 millions de déplacés à l’intérieur » informe M. Eyraud.

« L’avancée diplomatique est quasi-nulle, et le conflit s’enlise, à cause d’une indifférence totale », continue t-il. « La présence des journalistes, pourtant essentielle, se fait rare ». Ceux qui luttent contre la manipulation du pouvoir et les discours orientés sont empêchés de faire leur travail. Du coup, l’ignorance de la situation et le manque d’informations s’installent progressivement.

Selon M. Hénin, père d’un journaliste otage depuis juin 2013, « la Syrie n’accepte pas la présence de journalistes « témoins ». Sous une liberté « surveillée », certains groupes prennent les passeports des journalistes, et toute tentative de fuite doit être évitée de leur part, afin d’assurer le groupe de leur « objectivité » ».

En 2013, 29 journalistes ont été tués et 19 emprisonnés.

Parmi eux, quatre français : Nicolas Hénin et Pierre Torres, arrêtés à un barrage, Didier François et Edouard Ellias, arrêtés par un groupe, lors d’une intervention. « Leur arrestation a grandement sollicité au départ, l’intérêt général, déclare le père de l’otage. Mais, la situation qui dure a donné lieu là encore, à une indifférence qui grandit. Il ne faut pas oublier ce pourquoi ils ont été arrêtés : pour que nous soyons informés ».

Et la priorité des pouvoirs publics passe par l’opinion publique. La mobilisation est cruciale.

« L’augmentation de la violence, de l’islamisme, des exactions qui accompagnent cette guerre et l’opposition des communautés, ont laissé entrevoir la perspective d’une guerre civile », indique le journaliste.

« Cette guerre civile s’imbrique dans la révolution. La situation syrienne est devenue complexe et mal couverte par les médias à distance ».

Seuls les reporters de guerre sont en mesure d’alerter et de faire connaître la situation.

 Cette guerre par «  procuration », comme la nomme M. Eyraud, « est à l’avantage du régime de Bachar et des industriels ». Et à l’insu des syriens. Elle « doit cesser, pour que la guerre en elle-même cesse ». De plus, la diplomatie des grandes puissances fait survivre celle-ci avec les chiites d’un côté et les sunnites de l’autre.

La situation est complexe aussi par l’opposition États-Unis/Russie. « Le veto de la Russie et de la Chine à l’ONU fait survivre cette guerre, avec notamment d’importants enjeux économiques dans le cadre de la mondialisation ». Toutefois, la dépendance à ce pays est tout de même « bien moins importante que dans le cadre de l’Irak, précise M. Eyraud, ce qui devrait permettre une solution alternative ».

La politique moins interventionniste des États-Unis fait que seul le camp de la Russie tient les armes, d’après le président du comité de soutien.

Quel espoir reste-t-il pour ce pays, enraciné dans la guerre, au bord de l’explosion ? « Pour l’instant, conclut M. Hénin, la situation de la Syrie ne permet pas de solution objective ». Et de poursuivre : « La solution diplomatique serait la meilleure, mais cela n’est possible que par une entente entre les différents groupes syriens. » Espérons que cette entente verra bientôt le jour …

 Nolwenn