2012, le film d’une année

Soyez heureux de ne pas être morts dans une apocalypse de type maya le 21 décembre dernier. Ceci aurait pu être fort regrettable, n’est-ce pas ? Et c’est donc dans la liesse des fêtes de fin d’année que vous vous épanchez allègrement, joyeux de vivre et de pouvoir dépenser en cadeaux, nourritures, joujoux, babioles…

Une année qui s’achève, une autre qui commence diront les plus terre à terre. En cette période de résolutions au commencement de 2013 (résolutions que tous vous ne tiendrez, avec beaucoup d’efforts, que trois jours), il serait temps de tourner la tête et de constater. Constater en quoi cette année 2012 a été particulière, et quelles conclusions en tirer.

Il va de soi qu’une rétrospective s’impose pour aborder sereinement ce nouvel an.

Soyez pessimistes au regard de l’année achevée. Quelle année pour la démocratie ou pour son persiflage ! Nous la débutions par des révoltes syriennes, des bombes, des morts, et nous le terminons par des révoltes syriennes, des bombes, des morts… Annus horribilis. Que dire des élections russes en mars dernier ? Que dire de cette prétendue liberté russe lorsque l’on voit les Pussy Riots se faire arrêter pour avoir osé manifester contre le pouvoir poutinien ? Une liberté, une démocratie bien illusoires. Et quand le pays le plus peuplé, la Chine, élit son président choisi à l’avance par le parti unique… Une année bien pâle pour le peuple à l’étranger.

Et encore ! Là où certains se font tuer ou contrôler par le pouvoir en place dans le meilleur des cas, d’autres meurent dans un cinéma à Denver en face du grand justicier Batman, ou d’un étudiant quelque peu dérangé, on ne sait plus très bien. Ironie du sort. Ou se font massacrer par un américain mal intentionné (pléonasme ?) et armé (pléonasme !) dans une école primaire. Le 2ème amendement: une liberté ? De tuer oui ! 2012 année de violence, de méprise.

Et que dire des révolutions arabes de 2011, si porteuses d’espoir un an auparavant…

En Tunisie, les intégristes ont le pouvoir, en Egypte les révolutionnaires ont la gueule de bois… Leur force, leur motivation ne sont pas éteintes, mais la religion, l’armée, le pouvoir autoritaire, les décrets de Morsi: rien ne les aide. Pour eux aussi, l’année 2012 se termine comme un rêve se consume au réveil.

Soyez pessimistes aussi en ce qui concerne l’Europe. Une Grèce en faillite, des indignés en Espagne, un Berlusconi qui désire jouer le rôle de sauveur en Italie, une Irlande qui se verrait bien indépendante… L’Union vacille. Et face à la possibilité d’une intégration politique plus forte, qui permettrait à terme de retrouver une certaine cohésion entre les Etats membres, la Grande Bretagne proteste, et s’attire les foudres des autres nations avec en tête Jacques Delors. Morosité européenne.

Au rythme du Gangnam Style, le monde se déchaîne. Internet, à l’évidence, occupe une encore plus grande place dans nos vies, et s’affirme comme source de tensions. Rappelez-vous la déferlante fanatique liée à la publication de la vidéo anti-islam sur Youtube montrant le prophète Mahomet homosexuel. La mort du consul américain en Libye à Benghazi en sera un témoignage. En France, ce fut lors des élections présidentielles que la vague numérique a déferlé.

Il n’est désormais plus possible d’éviter une campagne facebookienne, twiterienne, ou autre.

Durant le débat télévisé entre François Hollande et Nicolas Sarkozy de mai dernier, l’affrontement s’est également fait sur Twitter: chaque annonce était scrutée, chaque chiffre avancé vérifié.

Lui président, un changement apparaîtra. L’espoir fut la marque de fabrique de la campagne socialiste qui permit à François Hollande de devenir le 6ème Président de la Vème République française le 6 mai dernier. Un changement… Face aux rudesses de la crise, les projets ont malheureusement du mal à aboutir. Le droit des vote des étrangers a été levé du débat public, la contestation contre le droit au mariage pour tous se fait entendre et fait barrage, les Front de Gauche et les communistes qui se désunissent de la majorité sur la question budgétaire, les 11 trimestres de hausse du chômage qui caractérisent 2012 (2,8 à 3,1 millions de demandeurs d’emploi), des entreprises comme PSA qui décident de supprimer 8000 postes, ou encore le conflit social d’Arcelor Mittal font flancher les espoirs socialistes…

C’est donc par une volonté et un pouvoir fort, et une union gouvernementale, que les projets d’avenir pourront voir le jour

Sur cinq ans, qu’on nous dit. Alors attendons, et jugeons en temps voulu.

C’est surtout une gauche unie qui a désormais pour tâche d’affronter l’extrême droite en la personne de Marine Le Pen et du Front National, nouvelle troisième force du pays avec son inquiétant 18% aux dernières présidentielles. La crise, ses effets…

Quant à la droite, que dire ? A part que 2012 aura été l’année de sa dislocation. Tiraillée entre ses racines républicaines, qui la poussent vers le centre droit et le nouveau parti UDI de Jean-Louis Borloo, et sa récente radicalisation vers l’extrême (le courant de “la Droite forte”, incarné par Guillaume Peltier, en est un exemple), résultante du sarkozisme, elle permet désormais à des personnalités comme Nadine Morano d’inviter, lors des dernières législatives, les frontistes à se rallier à elle, tout en prétendant que finalement “leurs idées ne sont pas si éloignées”.

La droite… L’extrême droite… Du pareil au même ? Historiquement non, aujourd’hui malheureusement nous nous en rapprochons.

Mohamed Merah n’aura été que le signe avant coureur d’une France en train de tomber dans la facilité, dans la non-solution, dans un pleutre populisme, dans la peur de l’autre, de la différence. La France, ce n’est pas ça, ou du moins ce n’est pas ce pourquoi des générations entières ont combattu que ce soit au nom de la liberté, de l’égalité, ou de la tolérance aussi bien religieuse, sexuelle qu’ethnique.

Et ce n’est malheureusement pas avec le pâle conflit de pouvoir Fillon-Copé, qui détruit, achève, l’UMP que la situation s’arrangera.

Année 2012, année des grands sauts dans l’inconnu ? Félix Baumgartner vous dirait que oui. Sur de nombreux autres aspects, c’est non. Non au vue des régressions qui ont été faites et des marasmes dans lesquelles nous nous trouvons.

Cet article n’est pas simplement le moyen de vous déprimer en ce début d’année, qui, je l’espère, vous sera bonne, mais de vous permettre de réfléchir à ce que la France, sa société, sa politique, mais aussi l’Europe et plus généralement le monde ont vécu durant un an. Peut-on donc oublier tant d’évènements et de troubles qui nous ont frappé ?

Nous ne devons pas être des Candide enfermés dans ce qui serait le meilleur monde possible.

Au vue de 2013, une réflexion profonde nous attend, tous. Quelle attitude adopter au vue de cette nouvelle année ? Liberté, égalité, tolérance, écoute, quel sera pour vous le leitmotiv ? Cet article ne vous donnera pas une réponse précise, chacun doit avoir la sienne. Il n’est là que pour vous donner des pistes, vous montrer où doivent désormais aller nos pensées, et pour vous permettre de vous souvenir que dans ce mouvement perpétuel qu’est le monde, chacun peut avoir un rôle à jouer s’il en est convaincu.

Car finalement, de quoi auriez-vous vraiment osé vous souvenir ?

 

Vincent OLLIVIER